Les Glacières, Bordeaux, 2019
Les aiguilles se montrent autoritaires : 19h. Elles sonnent le commencement de l’écriture du journal des « Chroniques du Réel », projet expérimental mis en place depuis le mois d’avril qui offre aux participants la liberté de raconter leur propre réalité tous les dimanches entre 19h et 19h05 à travers la rédaction « d’un rapport dactylographié descriptif et subjectif des personnes et des comportements ». Cette substance littéraire deviendra le carburant de LA MAISON DE PAPIER mais également la matière première essentielle à sa réalisation formelle. L’artiste nous propose ici la deuxième version de cette installation immersive.
C’est donc à l’heure de cette suspension temporelle que LA MAISON DE PAPIER prend forme alors que la secrétaire à la robe rouge s’installe à son poste et débute le recopiage des Chroniques sur sa machine à écrire. Révélant son appareillage tout bruyant et brinquebalant dans les entrelacs de sa chaîne de production infernale, cette sorte de Machine célibataire assigne une fonction précise à chacun des outils qui se positionnent les uns derrière les autres sous son ventre relâché. L’archivage peut démarrer et les allers-retours se multiplient frénétiquement entre les différents médias. Parmi les sons qui résonnent de manière cyclique, l’Homme agit tel l’Outil parfait, attentif et silencieux. Il apparaît ici comme l’instrument fétiche de la machine faisant lien entre les appareils et se pliant au rythme du concerto qui se joue devant lui.
Au bout de la chaîne de production, la CIBI oscille entre transmission et réception tandis que son antenne nous guide vers le Salon de lecture. Parcourant du bout des doigts les pages légèrement jaunies, la lecture des éditions des « Chroniques du Réel » se déroule dans un espace au mobilier fonctionnel. Au loin, surplombant la reconstitution d’un atelier, une vidéo de type INA témoigne des gestes du travail.
Prototype ‘performé’ pendant une semaine de 35h, l’Atelier de la fabrication de la brique démontre d’un savoir-faire artisanal unique. Blouses blanches et gants à l’appui, les mouvements exécutés convoquent une mise en place millimétrée des outils et obligent à une circulation des corps calculée jusqu’à l’entreposage du produit fini. Le Laboratoire du Geste fait apparaître les briques de papier empilées par séries dans l’attente d’être expérimentées. Une heure d’épuisement formel à l’intérieur de cette semaine de 35h de travail a permis de révéler tout un répertoire de gestes. En bout de parcours, Le Show Room de LA MAISON DE PAPIER offre un univers d’échantillonnage et de poésie, entre monstration de prototypes de briques, agencements domestiques en élévation et dessins radiographiques aux formes à la géométrie compulsive.
Avec les « Chroniques du Réel » et LA MAISON DE PAPIER, Charlie se pose ici en archéologue du présent et entend donner la parole à l’(extra)ordinaire d’un dimanche soir.
Eléonore Gros, commissaire d’exposition
Bureau d’édition des Chroniques du réel
2ème version, Installation, dimensions variables
Chaîne de travail permettant la transcription, l’édition, la diffusion et l’archivage des Chroniques du Réel.
Machinerie se jouant des modes de production, elle utilise l’humain comme l’Outil Parfait et lui pense un système créé à sa mesure. Au travers de ses différents organes de communication, elle transmet, retranscrit, enregistre, retransmet, recycle et reforme au rythme agaçant des doigts qui frappent sur la machine à écrire…
Multipliant les allers et retours entre différentes technologies obsolètes ou actuelles, cette installation permet de conserver, de transmettre et de produire une édition papier des Chroniques du Réel (copies papier, transmission sur ondes-courtes via une CB, site internet constitué des scans des Chroniques…).
Concernée par la question de l’archivage, cette installation a pour but de sauvegarder des données numériques sous leurs formes papiers.
«Le numérique se duplique, la matière est unique»
(Alain Damasio, Les Furtifs)
1° Le bureau de la secrétaire
Chaise et table en bois blanc, machine à écrire, rouleau de manutention recouvert de
vinyle noir cousu, tapis de table en vinyle noir cousu, lampe de bureau, orchidée, vase,
boite d’archive, papier listing 3 copies longueur totale de 250 mètres.
2° Le copieur
Table lumineuse inclinée, ruban de leds, habillage vinyle noir, plexiglass, table Baboo,
tabouret Ikéa, peinture blanche
3° Le duplicateur
Duplicateur à alcool, tapis de table en vinyle noir cousu, lampe de bureau vintage, table
Baboo, peinture blanche
4° Le scanner
Treteaux et planches, peinture blanche, tapis de table en vinyle noir cousu, copieur/
scanner A3
5° L’opérateur radio
Table, tabouret Ikea, peinture blanche, tapis de table en vinyle noir cousu, poste CB
Le Salon de Lecture
Espace destiné à la lecture des 16 éditions correspondantes chacune à un seul dimanche des Chroniques du Réel.
Éditions reliées, cordons de coton, portes journaux en bois
Impression jet d’encre sur papier A3 100g
Deux portants en bois (200 x 43cm) sur gonds
4 tabourets en bois 30×45 cm
Les Chroniques du Réel
Via un appel à participation lancé sur les réseaux sociaux chaque dimanche entre le 28 avril 2019 et le 13 septembre 2019, les participants furent invités à produire un texte durant 5 minutes le dimanche à 19h précise sur la base du protocole suivant :
« Faire un rapport dactylographié descriptif et subjectif détaillé des personnes et des comportements. »
Les données récoltées ont ensuite été dactylographiées, scannées, puis imprimées pour constituer les journaux des Chroniques du Réel.
Ces textes collectés puis retranscris via la dactylographe à la robe rouge sont le point de départ du bureau d’édition des Chroniques.
L’atelier de fabrication de la brique
Mobilier fonctionnel
Espace de travail destiné à la fabrication artisanale de la brique en papier. Matériau destiné au rebus, inexploité, déchet inexorablement produit par l’atelier de l’artiste, le papier brouillon, la copie carbone, le bandeau de test, le doublon, l’impression de textes et de notes, tout cela devient ici le symbole de ce qui est détruit, de ce qui ne sert plus, du consommable.
Afin de s’opposer à cet inexorable phénomène, le déchet est ici transformé en briques permettant de construire ou de re-construire.
L’atelier de la fabrication de la brique interroge la production de la matière qui va servir à la construction de l’oeuvre. Chaque mobilier est conçu pour convenir à chaque poste de travail accueillant le corps de l’artisan qui viendra façonner la matière.
1° La découpe
Servante à roulettes en bois (110 x 80 x 1 cm), broyeur à papier, massicot, pince, récipient en verre, panières en plastique noir, papier à recycler, seau 100 l noir, planche à roulette
2° Le broyage / le tamisage
Portant en bois, corde, seau en métal de 5 l, accessoires de quincaillerie, 2 seaux de 100 litres noirs, tamis, 2 planches à roulettes
3° Le transport
Servante à roulettes en bois (110 x 80 x 1 cm), 3 camions, 1 seau
4° Le coffrage
Portant en bois (200 x 4O x 2OO cm), 10 coffrages en bois (21,5 × 10,3 × 6,5 cm), scotch orange, seau avec plante filtrante
5° Le séchoir
4 étagères métalliques, (160 × 40 × 30 cm), briques en papier, plastique
6° Le laboratoire
Éprouvettes contenant différents bains issus du recyclage du papier (eau, encre, pâte de papier)
La Fabrication de la Brique
Documentaire tourné en format mini-dv (2019)
22 mn 46 s
Format PAL 4/3
A la manière d’un documentaire INA, ce film retrace gestes après gestes toutes les étapes de la fabrique artisanale de la brique en papier dans l’atelier conçu à cet effet
Laboratoire du geste
Installation
Espace d’expérimentation pour 5 actants
Séries de briques sèches numérotées de « 2 » à « 6 ».
Présentée sous sa forme inactive de type «terrain d’entraînement»,
Le laboratoire du Geste est un espace dédié à l’expérimentation du matériau de la brique en papier.
Il s’agit ici de «faire, défaire et refaire» afin d’épuiser les potentiels du matériau et de consigner un maximum des propositions obtenues dans un catalogue de formes (constructions architecturales, sculptures, gestes, chutes…)
